Garde ton calme et va à Taizé
Qu’est-ce que Taizé ? Pourquoi cette alliance inattendue entre une poignée de frères et des milliers de jeunes ?
Lorsqu’on demande aux jeunes ce qui les a le plus marqués lors de leur séjour à Taizé, neuf fois sur dix la réponse est : la prière !
Fr Roger disait : « La prière n’éloigne pas des préoccupations du monde. Au contraire, rien n’est plus responsable que de prier : plus on vit une prière toute simple et toute humble, plus on est conduit à aimer et à l’exprimer par sa vie. »
Le « succès » de Taizé tient à cette pédagogie de l’intériorité.
Des adultes et des jeunes sont conduits là où ils ne voulaient peut-être pas aller, sur un continent ignoré : au cœur d’eux-mêmes, pour y trouver une présence qu’ils ne soupçonnaient pas et qui peut tout changer de leur vie.
Un témoignage : Dès nos premiers jours, on entre de plain-pied dans la liturgie de Taizé, matin, midi et soir avec le silence au milieu de la prière. C’est très important que l’on puisse se plonger en soi-même pour y trouver Dieu, son image qui est en nous.
Bien sûr, on peut rencontrer Dieu n’importe où, puisqu’il nous habite.
Mais dans un endroit « priant », il y a une atmosphère particulière qui facilite cette rencontre.
Un témoignage : C’est l’esprit de joie et de reconnaissance. Pas d’euphorie, ni d’exaltation, non ! C’est un regard réaliste sur la vie !
Mais à Taizé on se sent comme à la maison, on va à l’église comme si on allait chez soi. Nous portons souvent en nous un sentiment de peur. La peur fait partie de notre vie. Elle est liée à notre histoire, notre malheur. Quand voyons comment vivent les gens ailleurs, dans des pays moins privilégiés, cela permet de relativiser nos difficultés.
Un carrefour était proposé : « Amitié entre chrétiens et musulmans. Expérience du vivre-ensemble aujourd’hui », animé par Frère Yohan et Ferenc Hardi. Frère Yohan explique : « (…) Je viens d’Indonésie, le quatrième pays le plus peuplé au monde et le premier pays à majorité musulmane en nombre de croyants. Les musulmans représentent 87 % de la population, et 9 % se déclarent chrétiens. Sur la pièce d’identité, il est indiqué quelle est notre religion.
En Indonésie, il est normal de parler de religion. Quand tu rencontres quelqu’un, il te posera la question : « Es-tu musulman ou chrétien ? » C’est vraiment quelque chose de normal.
J’ai beaucoup d’amis musulmans, et dans ma jeunesse, j’accompagnais mes amis à la mosquée. Je ne pouvais pas entrer, mais je voyais mes amis prier. C’était beau de les voir prier. Quand la fête de Noël approchait, je chantais à l’église, et ils étaient surpris de me voir chanter. Je les avais invités à participer à une célébration à l’église. »
Younes a témoigné : « Je suis musulman et je suis venu à Taizé pour découvrir ce lieu. » Une fille a demandé : « Es-tu venu de ton propre gré ou as-tu été invité ? » La réponse de Younès : J’ai reçu le message qu’il était possible d’aller à Taizé, et j’ai décidé de m’y rendre.
Une autre question : « Comment ont réagi tes parents quand tu leur as dit que tu voulais aller à Taizé ? Est-ce que tes parents sont musulmans ? » Ils ont trouvé des informations sur Taizé en ligne et ont compris que c’est un lieu de rassemblement pour les jeunes chrétiens et pour ceux qui recherchent un sens à leur vie. Je ne vous cache pas qu’ils ont été surpris par ma demande, mais ils m’ont fait confiance, car le programme proposait, en plus des prières, la possibilité d’échanger avec des jeunes du monde entier. Mes parents m’ont encouragé à y aller.
Une autre question : En entrant dans l’église, as-tu remarqué une différence entre une prière à l’église et à la mosquée ? Oui, j’ai été surpris, car à la mosquée, les hommes sont devant et les femmes derrière, alors qu’à l’église, les hommes et les femmes sont côte à côte.
Question : « Est-ce que tu vas à la mosquée ? Qu’est-ce que tu trouves bien dans le fait qu’à l’église, les femmes et les hommes soient assis les uns à côté des autres ? Quel est ton avis ?
Je vais à la mosquée quand je peux. Elle est juste à côté de chez moi. Je trouve bien que les hommes et les femmes soient ensemble.
Question : Es-tu venu de ton propre gré ou avec ton lycée ?
Je suis scolarisé dans une école privée catholique, Don Bosco, à Marseille, donc je suis venu avec mes camarades de lycée.
Question : Qu’est-ce qui t’a étonné dans notre manière de prier ou de converser avec Dieu ? Y a-t-il des choses qui te surprennent ?
Oui, au départ, j’ai été surpris, mais en y réfléchissant, c’est un peu comme à la mosquée : nous récitons les sourates, et vous, vous répétez des textes bibliques.
Question : Pourquoi es-tu venu à Taizé en tant que musulman ?
Je suis venu parce que je connais peu la religion chrétienne. C’est une expérience de rencontre avec des jeunes chrétiens qui m’a donné le courage de venir.
Question : Est-ce que tu chantes pendant la prière ?
Non, j’écoute.
Question : Est-ce que tu participes aux programmes proposés à Taizé ?
Oui, je suis venu avec des jeunes de mon lycée à Marseille, donc je participe avec eux sans problème.
Question : Est-ce que cela te gêne ?
Non, pas du tout. Je suis venu pour découvrir la religion chrétienne.
Une fille : « J’ai trouvé cela tellement beau. »
Younes : « Merci beaucoup ! »
Question : « Avez-vous aussi une prière d’adoration, comme notre prière autour de la croix ici à Taizé ? Est-ce que cela te semble un peu étrange ou inhabituel, ce que nous faisons ? »
Votre prière autour de la croix, je la trouve spéciale, notamment le fait de se concentrer sur la croix et d’y confier ses fardeaux. Chez nous, nous avons aussi une prière spéciale, le vendredi midi.
Il est temps de nous séparer, car c’est le moment d’aller manger. Des jeunes se sont approchés de Younes pour échanger en privé. Nous remercions Younes pour son témoignage, et les jeunes qui s’intéressent au dialogue avec d’autres religions.
Jésus propose son amitié à tous.
Et cette amitié que Jésus montre, nous pouvons aussi la vivre entre nous.
Ceux qui aiment le Christ sur toute la terre forment à sa suite comme une grande communauté d’amitié.
Créer, consolider une communauté d’amitié : n’est-ce pas une contribution que les chrétiens peuvent apporter en vue de l’avenir de nos sociétés ?
Le Christ, nous invite à laisser derrière nous l’esprit de rivalité, qui entraîne les oppositions, les injustices, et à devenir des créateurs d’amitié, des artisans de paix.
Le Christ nous appelle tous à élargir notre amitié. Et nous pouvons le faire tout simplement, comme Jésus le faisait, par un repas partagé, par une visite, et surtout en apportant autour de nous le pardon et la confiance.
A la prochaine fois. R. JANIEC