Taizé 2025 – Génération Y Croire
Chaque année, pendant les vacances de la Toussaint, nous prenons la route vers Taizé, ce lieu unique de prière, de rencontre et de partage.
Cette année, 61 jeunes Marseillais, venus de quatre établissements — le lycée Mélizan, Tour Sainte et deux établissements salésiens, dont Sévigné et le nôtre — ont eu la joie de représenter notre région.
Sur la colline, nous avons rejoint 1 800 autres Français, mais aussi 250 Allemands, 44 Hollandais et 7 Suisses.
Dès notre arrivée, une belle aventure a commencé : chants, temps de silence, échanges, rires et moments fraternels ont rythmé nos journées.
Et quelle joie de retrouver Lina, une ancienne élève, rayonnante, dont la présence et l’enthousiasme nous rappellent à quel point l’esprit de Taizé reste vivant, année après année.
Lors de notre séjour à Taizé, nous avons eu la chance de rencontrer frère Critovao, un homme chaleureux et plein de sagesse. Cela fait trente-cinq ans qu’il connaît Taizé, et il s’y est engagé comme frère il y a tout juste trente ans.
Depuis vingt-sept ans, il vit au Brésil, dans une fraternité avec trois autres frères.
La rencontre a commencé dans une atmosphère simple et conviviale.
Chacun des jeunes s’est présenté à tour de rôle. La majorité découvraient Taizé pour la première fois, sauf Lina, pour qui c’était déjà le troisième séjour.
Emmanuel a alors posé une question à frère Cristovao :
— Comment avez-vous connu Taizé ?
Frère Cristovao a souri avant de répondre : C’est simple. Quelqu’un que je connaissais avait participé à la Rencontre Européenne de Wrocław en 1989. Il m’a parlé de l’ambiance, de la paix qui y régnait… Alors, j’ai décidé de partir en auto-stop pour venir à Taizé. À l’époque, j’ai étudié l’informatique, mais il n’y avait pas encore ni Windows ni Internet ! Je suis venu à Taizé d’abord comme volontaire, et puis, petit à petit, je me suis senti appelé… jusqu’à m’engager dans la communauté comme frère.
Je vis actuellement à Alagoinhas, où, depuis 1978, les frères accueillent des groupes et des visiteurs pour des rencontres et des retraites, tout en partageant avec nous leur prière quotidienne.
Au quotidien, nous partageons la vie des habitants de notre quartier, un bidonville, ce qui nous permet de découvrir leur quotidien, leurs joies et leurs difficultés, et de vivre une véritable expérience de proximité et de solidarité.
– Vous pouvez nous raconter comment se passe la vie là-bas ?
Les gens sont sympas et accueillants ? Est-ce que c’est dangereux ?
Frère Cristovao : La vie quotidienne dans notre quartier est marquée par des contrastes saisissants. La pauvreté, l’inégalité, et les difficultés d’accès aux services de base coexistent avec une forte résilience communautaire, une créativité culturelle et une solidarité importante.
Nous pouvons dire que la culture et la solidarité entre les habitants donnent une identité forte et résiliente. Malgré les difficultés, notre quartier rayonne d’une richesse culturelle remarquable, avec ses traditions, ses fêtes et la créativité de ses habitants qui font vibrer la vie quotidienne.
La musique — notamment la samba, le funk et le pagode —, la danse, les arts plastiques et le street art sont des expressions puissantes de la créativité et de la résilience des habitants.
Sans oublier les réseaux de solidarité importants qui existent au sein des communautés, favorisant la cohésion sociale et l’entraide entre voisins.
Ces réseaux jouent un rôle essentiel pour faire face aux défis du quotidien.
La vie dans notre quartier est loin d’être simple. La pauvreté, le manque d’opportunités et la faible présence de l’État créent un terrain fertile pour l’implantation de groupes criminels organisés.
Ces groupes contrôlent parfois certaines zones, mettant en péril la sécurité et le quotidien des habitants.
Pourtant, il est essentiel de rappeler que la grande majorité des habitants n’est pas impliquée dans ces activités. Ils continuent de vivre, de se soutenir et de se battre pour leur communauté, malgré les difficultés.
Un peu de l’histoire
Frère Cristovao : Le Brésil est marqué par de profondes inégalités socio-économiques, inimaginables en Europe. Cet écart trouve ses racines dans l’héritage de la colonisation et du système esclavagiste, qui ont compliqué la situation.
L’accès limité au logement, à l’eau potable, à l’électricité et aux services de base a contraint les populations les plus vulnérables à s’installer dans des zones marginalisées, souvent situées en périphérie des villes.
« Quelle est l’identité spirituelle du Brésil ? » demande Lina.
Frère Cristovao : Le Brésil possède une riche histoire de colonisation et d’immigration, qui a abouti à un mélange unique de croyances africaines, autochtones et européennes.
Le syncrétisme religieux est la clé pour comprendre l’identité spirituelle du pays.
La valeur des fêtes religieuses montre qu’elles ne sont pas seulement destinées au culte, mais qu’elles ont aussi pour vocation de rassembler, d’éduquer et de divertir les gens.
Elles jouent un rôle de rassemblement grâce à leur dimension festive.
Ce récit, à la fois humble et inspirant, nous a rappelé à quel point une simple rencontre peut changer le cours d’une vie.
« Comment est-il possible de vivre et de rencontrer des gens dans l’extrême pauvreté, et pourtant de voir chez eux une joie sincère au cœur des difficultés ? »
Frère Cristovao : Eh bien, il faut dire qu’il y a deux Brésils : celui où certaines personnes vivent dans un grand confort matériel, et celui de la pauvreté, voire de l’extrême pauvreté.
Chez les Brésiliens, la joie fait partie de leur tempérament ! C’est vraiment ce qui m’a le plus touchée. C’est paradoxal, car visuellement, rien ne va — c’est un quartier extrêmement pauvre —, et pourtant, il y a cette joie contagieuse.
Notre présence est essentielle pour eux, car il y a, dans leur ADN, cette capacité à se tourner vers plus grand qu’eux : vers Dieu.
Nous avons encore beaucoup de questions, mais nous devons partir, car nous avons la responsabilité de distribuer le goûter.
Nous remercions frère Cristovao pour le temps qu’il nous a consacré, et nous sommes conscients que demain, il repart au Brésil ; il doit donc préparer ses affaires.
Lina, une jeune fille musulmane, voit ses yeux se remplir de larmes à chaque prière du soir. Elle témoigne : Chaque année, le même bouleversement la traverse, surtout lors de la prière autour de la croix, quand chacun est invité à déposer son fardeau au Christ.
Puis vient la prière de la Résurrection — un moment de lumière, d’espérance, où son cœur se laisse toucher sans qu’un mot ne soit prononcé.
C’est certain, je reviendrai l’année prochaine, confie-t-elle, car dans la prière, je trouve la paix. Taizé m’a appris à pardonner aux autres et à trouver la paix intérieure. À me recentrer sur moi-même et à apprendre à vivre seule. Je vais à Taizé pour me reposer et faire le vide dans ma tête.
À Taizé, le temps passe très lentement par rapport à mon quotidien ; c’est pour cela que je profite de ces moments de liberté pour ne penser à rien, écrire, dessiner ou rencontrer des gens. Aujourd’hui, avec les nouvelles technologies, tout va vite : on reçoit l’information instantanément. Mais à Taizé, le temps semble se mettre en pause, comme dans une bulle temporelle. Le calme y est reposant et agréable.
J’aime aller à Taizé pour prendre du temps pour moi — aller courir le matin, par exemple. Merci à M. Janiec de m’avoir fait découvrir toutes ces belles choses.
Lorenzo : J’avais tellement envie de découvrir Taizé, un endroit que j’avais toujours entendu décrire comme magique. Mais au-delà de la curiosité, j’avais besoin de me rapprocher de Dieu. Dès mon arrivée sur la colline, un mélange d’émotions m’a submergé : joie, étonnement, et même un peu de tristesse. C’était puissant, intense, et pourtant difficile à mettre en mots.
Le moment qui m’a le plus marqué a été la prière autour de la croix. Pour la première fois, j’ai senti que je pouvais libérer tout ce que j’avais sur le cœur. Les prières du matin, du midi et du soir ont renforcé ce sentiment de paix intérieure.
Au-delà de la spiritualité, Taizé m’a offert des rencontres incroyables. Des échanges simples, sincères, et des liens qui restent même après le retour chez soi. Si je devais résumer mon séjour en quatre mots, ce serait : partage, rencontre, prière, émotions.
Ce que j’ai aimé aussi, c’est cette déconnexion totale. Même si nous n’avions pas de connexion, c’était parfait pour se déconnecter des téléphones.
En repartant, j’ai compris que Taizé n’est pas seulement un lieu de prière, mais un endroit qui transforme. Je n’ai aucun regret d’y être allé, et j’y retournerai avec grand plaisir. Un immense merci à M. Janiec de m’avoir donné l’opportunité de vivre cette expérience unique !
William : Je me suis décidé à partir à Taizé parce que je voulais sortir de ma zone de confort et vivre quelque chose de différent de mon quotidien. On me l’a simplement proposé, et j’ai accepté. En arrivant sur la colline, je n’ai pas vraiment ressenti grand-chose. J’étais surtout curieux de découvrir la suite. Il n’y a pas de moment précis qui m’ait marqué, à part les prières du soir, que j’ai trouvées très belles, et le fait d’avoir parlé avec le jeune père Jean-Marie.
En faisant le bilan de mon séjour, je dirais que je ne suis pas fait pour le “monde religieux”. J’ai quand même profité des célébrations pour réfléchir un peu sur moi-même.
Si je devais résumer mon séjour à Taizé en quatre mots, je dirais que c’était un mélange d’ennui et de légères déceptions personnelles — sans doute à cause de trop d’attentes de ma part concernant les relations sociales — mais globalement, ce n’était pas inintéressant.
Emmanuel : Ce qui m’a donné envie d’y aller, c’est le fait de rencontrer plein de monde. Mes motivations étaient de me faire des amis. Quand on est arrivés, je me suis dit : « Dans quoi je me suis encore embarqué ? »
Le moment qui m’a le plus marqué, c’est quand j’ai rencontré Mathis, qui est devenu un ami. À vrai dire, je ne ressens pas grand-chose, à part de l’ennui. Je n’en tire pas vraiment de bilan personnel. Les quatre mots qui résument mon expérience seraient : pourquoi pas le refaire.
Nous avons eu le plaisir d’admirer des dessins réalisés par les enfants d’Ukraine, qui transmettent avec passion leurs émotions et leur créativité à travers leurs œuvres artistiques.
Pendant les deux semaines de vacances, plus de 5 000 Français sont venus visiter la colline, découvrant ainsi la richesse et la vitalité de ces réalisations.
R. Janiec



